Entre foi et médecine, au service des malades en Afrique
Né le 5 février 1977 à Yadè, dans la région de Kara au Togo, Frère Claude est religieux au sein de l’Ordre hospitalier de Saint Jean de Dieu et chirurgien viscéral. Au fil des années, il a su concilier sa vocation spirituelle et son engagement médical. Il revient sur son parcours, sa mission et les défis auxquels il fait face, après une année de stage à l’hôpital de Douai.
Frère Claude, qu’est-ce qui vous a conduit à devenir Frère et… chirurgien ?
Je suis né le 5 février 1977 à Yadè, dans la région de Kara au Togo. Enfant, je faisais partie des servants de messe et du groupe vocationnel de ma paroisse du Sacré-Cœur de Jésus. Mon désir de servir Dieu à travers les malades est né lors des visites du Frère Florent, un frère de Saint Jean de Dieu lui-même chirurgien, qui venait consulter les malades dans mon village. Après avoir obtenu mon bac en 2001, j’ai intégré le postulat chez les Frères de Saint Jean de Dieu à Tanguiéta, au Bénin. J’ai poursuivi ma formation avec le noviciat de 2003 à 2005 à Lomé, au Togo, avant de prononcer mes premiers vœux en 2005.
Durant mon postulat, j’ai été sensibilisé au travail des soignants, notamment en chirurgie, où Frère Florent était souvent seul à intervenir. Cela m’a poussé à entreprendre des études de médecine à l’Université de Parakou, au Bénin, de 2008 à 2016. En 2019, je me suis inscrit à l’Université de Lomé pour une spécialisation en chirurgie viscérale, formation de cinq ans que j’ai achevé par un stage d’un an à l’hôpital de Douai, en France.
En quoi consiste une vocation de chirurgien et Frère hospitalier en Afrique aujourd’hui ?
Ma mission première est de témoigner, en adoptant une approche différente du malade fidèle à l’enseignement reçu de notre fondateur, saint Jean de Dieu. En offrant des soins de qualité, je souhaite que chaque patient ressente l’intervention de la Providence, même dans sa souffrance. Cependant, ce n’est pas toujours simple. Certains patients pensent ne pas être bien pris en charge, notamment en raison du manque de moyens financiers ou de l’ignorance qui retardent souvent la consultation. De plus, les infrastructures et équipements disponibles ne permettent pas toujours une prise en charge optimale des cas complexes.
Comment voyez-vous le rôle des Frères hospitaliers de Saint Jean de Dieu dans la prise en charge des malades et des pauvres en Afrique, et comment contribuez-vous à cette mission en tant que chirurgien ?
Les Frères hospitaliers jouent un rôle essentiel en apportant un soutien vital à des populations souvent démunies. Je contribue à cette mission en étant disponible pour soigner les malades et en poursuivant une formation continue afin d’améliorer mes compétences. Cela n’est pas sans sacrifices, car il m’arrive de manquer les prières communautaires ou les messes en raison d’urgences chirurgicales. Mais je vois cela comme une autre forme de célébration, à côté du Christ souffrant. Dans chaque patient souffrant, je vois le Christ. Et même si mon travail m’empêche parfois de participer aux offices, mes confrères prient pour moi, et cela me porte.
Que retenez-vous de votre formation en France ?
En France, j’ai accès à des plateaux techniques avancés, ce qui renforce mes compétences, notamment en chirurgie viscérale. Par exemple, la coelioscopie, une technique encore rare en Afrique, est couramment utilisée ici. Mon objectif est d’introduire ces méthodes dans nos structures pour offrir une prise en charge de qualité aux patients les plus démunis.
Quels sont les besoins aujourd’hui en Afrique et comment l’Ordre hospitalier y répond-il ?
Le principal besoin est de mettre en place une assurance maladie pour garantir un accès à des soins de qualité. Il est aussi nécessaire de sensibiliser les populations à l’importance de consulter un médecin. L’Ordre hospitalier répond à ces défis en formant des personnels qualifiés et en assurant une prise en charge adaptée, souvent dans des conditions difficiles.
Le manque de formation des chirurgiens, les équipements insuffisants et les faibles conditions de vie des médecins sont aussi des obstacles majeurs. Les infrastructures doivent être développées et les jeunes médecins encouragés à se spécialiser.
L’avenir de la santé en Afrique repose sur l’accès à la technologie et sur une meilleure collaboration entre les acteurs locaux et internationaux. L’Ordre peut continuer à jouer un rôle majeur en formant le personnel, en équipant les structures et en établissant des partenariats solides.
Quel message souhaiteriez-vous adresser à ceux qui envisagent de suivre vos pas ?
Être religieux et médecin est une mission exigeante mais enrichissante. Quoi de plus beau que de soigner les corps et les âmes ! Je conseille aux jeunes de se laisser guider par leur vocation et de rester humbles, car cette mission repose avant tout sur la grâce de Dieu !