[Chapitre général] « Nous avons une grande et belle mission ! »
À la veille de l’élection de son successeur, Frère Jesús Etayo, supérieur général sortant de l’Ordre hospitalier de Saint Jean de Dieu, dresse un bilan de ses 12 années de mandat. Dans cet entretien, il partage les défis, les moments de joie et les leçons tirées de son parcours à la tête de l’Ordre, tout en transmettant un message d’espérance aux membres de la Famille hospitalière.
Comment décririez-vous ces 12 années en tant que supérieur général de l’Ordre ?
Douze ans, c’est long ! Je dirais que cela a été une période très riche pour moi, personnellement. J’ai eu la chance de vivre intensément la vie de l’Ordre et l’esprit d’hospitalité. C’est donc une période extrêmement enrichissante, et c’est ce dont je me souviendrai. C’était bien sûr un honneur, surtout pour la confiance que Dieu et les frères m’ont accordée afin de remplir ce service. Cela a représenté une grande responsabilité, mais, comme je le dis, je suis heureux. En résumé, ce furent 12 années d’une grande richesse.
Quels ont été, pour vous personnellement et pour l’Ordre, les moments les plus marquants de ces deux mandats ?
Il y a eu des moments très beaux et aussi des moments difficiles. Je me rappelle, par exemple, l’épreuve de la crise Ebola, qui a touché nos frères et collaborateurs en Afrique. C’était un moment très éprouvant. Plus récemment, la pandémie a également été un défi considérable. Non seulement elle a bouleversé la vie de tous, nous obligeant à rester chez nous, mais elle a aussi causé la perte de frères, de collaborateurs et d’autres éléments qui ont marqué cette période.
Un autre moment particulièrement difficile a été la perte de l’hôpital de l’île du Tibre, à Rome, qui appartenait à l’Ordre depuis plus de 400 ans. À l’inverse, des moments de joie ont également jalonné ces années, tels que la réception du prix Princesse des Asturies, qui, au-delà de la reconnaissance elle-même, a mis en lumière le dévouement de nombreux frères et collaborateurs. Aller dans des lieux reculés et observer la simplicité et la dévotion de nos frères et collaborateurs est également un souvenir marquant : c’est là que l’on voit que saint Jean de Dieu est présent.
Enfin, je n’ai pas mentionné la récupération de l’hôpital de Grenade, qui était un projet initié par notre fondateur lui-même mais qu’il n’avait pas vu aboutir. Grâce à la province espagnole, nous avons pu le récupérer et entreprendre des travaux pour le restaurer. C’est une vraie perle pour l’Ordre.
Y a-t-il des domaines dans lesquels vous auriez aimé faire davantage, ou des priorités pour l’avenir ?
On peut toujours faire plus, et il y aura toujours des regrets. Je n’ai pas abordé cette période comme une mission personnelle, mais comme celle de l’Ordre dans son ensemble. Je ne suis qu’un maillon de la chaîne, même si le supérieur général est en première ligne et assume une grande responsabilité. J’aurais souhaité progresser davantage sur certains aspects, mais je comprends que chaque province a son propre rythme et ses réalités. Nous sommes une institution avec une tradition d’autonomie des provinces, ce qui complique parfois les progrès. J’aurais notamment voulu que la question des unions ou fusions entre provinces avance davantage, mais je reste satisfait de ce qui a été accompli.
Quel message souhaitez-vous transmettre aux membres de la Famille hospitalière ?
Mon message est que nous devons être courageux. Ce Chapitre, je l’espère, inscrira cela dans son document final. Deux points me semblent essentiels. Premièrement, continuer à avancer dans l’hospitalité, car le Seigneur nous y appelle encore. Lors d’une journée de prière pendant ce Chapitre, la scène de Moïse m’est revenue : « J’ai ressenti la douleur de mon peuple et je t’envoie ». Le Seigneur continue de souffrir face à tant de souffrances, de guerres et de maladies dans le monde. Il nous envoie pour vivre et pratiquer l’hospitalité et la compassion.
Deuxièmement, je veux insister sur l’importance de nos collaborateurs, frères et laïcs, qui participent à cette mission. Que ce soit par leur professionnalisme ou par vocation, ils rendent possible la continuité et l’expansion des services d’hospitalité. Nous avons une mission magnifique, et j’espère que nous serons encore plus nombreux à l’avenir pour offrir au monde une alternative d’hospitalité, une expression d’amour et de service pour accueillir ceux qui en ont besoin, les migrants rejetés, les personnes séparées par la violence. C’est le message que je veux laisser : nous avons une grande et belle mission. Ensemble, continuons d’avancer et soyons heureux de notre tâche.
J’espère que l’Ordre continuera d’accomplir sa mission avec humilité et fierté, car c’est le Seigneur qui nous donne la vocation et nous envoie chaque jour faire le bien autour de nous.
Retrouvez l’entretien vidéo en espagnol ⤵️